Notes

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Aux XVe et XVIe siècles, les tentures des chœurs clos narrant la vie de saints fondateurs venaient tout à la fois orner de couleurs les boiseries hautes des stalles et jouer, temporairement et de manière cyclique, un rôle éthique. En rappelant les faits marquants de la vie du saint, les scènes ainsi déployées stimulaient la dévotion, la ferveur et l'esprit d'imitation.

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Le couvent des dominicains de Trèves vient tout récemment de faire l'objet d'une synthèse par Dieter Schultz, enseignant en histoire à la retraite, passionné par l'histoire du lieu sur lequel il exerça sa profession Ajouter en lien le fichier allemand Dominikaner (à prendre sur clef USB car trop lourd pour un envoi par mail).
Des extraits de son étude ont été publiés en 2011 et 2012 :
- « Das Schicksal des Trierer Dominikanerklosters und seiner Kirche im Schatten des Domes », Trier, Kurtrierisches Jahrbuch, 2011, 51, p. 187-213.
- « Schicksal desDominikanerklosters », Trier, AVG (Auguste-Viktoria-Gymnasium) Journal, 2012, 1, p. 12-14.

Maison Pierre Seilhan

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Aux XVe et XVIe siècles, les tentures des chœurs clos narrant la vie de saints fondateurs venaient tout à la fois orner de couleurs les boiseries hautes des stalles et jouer, temporairement et de manière cyclique, un rôle éthique. En rappelant les faits marquants de la vie du saint, les scènes ainsi déployées stimulaient la dévotion, la ferveur et l'esprit d'imitation. Les tapisseries couraient le long des stalles, les surmontant, y compris sur le retour du jubé. Laura Weigert note que l'aménagement textile du chœur, phénomène observable aussi bien en France qu'en Allemagne, en Angleterre qu'en Italie, portait alors le nom de dorsalia . En application des principes du concile de Trente, la transformation progressive des chœurs par la destruction fréquente des jubés dans le but de créer une unité visuelle entre la nef et le chœur, rendit caduque l'usage des tentures dont un bon nombre avait déjà disparu au cours des guerres de Religion. La représentation de la vie des saints s'inscrivit dès lors dans la sculpture des parois boisées, au-dessus des sièges. Ces dorsalia de bois rendirent pérenne la narration hagiographique, offerte désormais au regard quelle que soit la phase du cycle liturgique en cours.
Au XVIIe siècle, les scènes de la vie de la Vierge ou de celles des saints tendirent à être séparées les unes des autres par des bordures encadrantes de points tissés, créant une césure entre les épisodes. Ce fractionnement inaugurait le remplacement de la linéarité narrative et spatiale des dorsaux textiles par un cloisonnement de scènes circonscrites, au niveau des dorsaux boisés, à la largeur d'un dossier. Autonomisées spatialement, les scènes purent même s'écarter les unes des autres tout en maintenant la cohérence du récit. C'est à cette dernière configuration que semblent se rattacher les six dorsaux de stalles peints conservés dans la Maison Seilhan à Toulouse (France). Enchâssées dans des cadres aux formes chantournées, les toiles présentent neuf scènes de la vie de saint Dominique, augmentées de la représentation du martyre des céphalophores de Muret. Si les tentures de la Renaissance rendaient hommage au saint fondateur de l'église locale ou au saint dont les reliques étaient conservées dans le lieu, les six dorsaux à l'étude font aujourd'hui mémoire du saint, fondateur de l'Ordre des Prêcheurs, dans le lieu même où il installa sa première communauté en 1215. Le genre littéraire de la narration est renouvelé par une mise en forme théâtrale des évènements, présentés à la surface des toiles sur des scènes surmontées de rideaux.

Laura Weigert explique que « parmi leurs multiples fonctions, les tentures de chœurs servaient à montrer la générosité de leur donateur, lequel jouait un rôle important dans le choix et l'organisation des évènements représentés . Le donateur « était intégré dans la vie du saint par trois moyens : la présence des armes, l'inclusion de son portrait et des inscriptions prenant acte de sa donation ».
Les dorsaux de la Maison Seilhan portent de fait des inscriptions : noms et fonctions de personnages, pour quatre toiles, et, pour toutes, des armoiries. Ces marques figurant dans le bas des œuvres ont permis, lors de leur campagne de restauration (2005-2008), de les rattacher à leur lieu de création : le couvent des Prêcheurs de Trèves. Cette avancée dans la connaissance de l'histoire des tableaux ne fut pas immédiatement prolongée. Or, si les inscriptions et les armoiries sont celles de donateurs, elles doivent être considérées avec intérêt comme témoins précieux du contexte d'élaboration des dorsaux. Les mécènes jouèrent-ils un autre rôle que celui de financer la création artistique ? Ont-ils participé plus amplement au projet de réaménagement du chœur ? L'association entre leurs armes et telle scène de la vie de saint Dominique fut-elle aléatoire et fortuite ou résolument déterminée au moment de la commande ? La générosité des donateurs fut rarement gratuite comme en témoignent leurs testaments. En faisant don, ils espéraient perpétuer leur propre mémoire et contribuer à leur salut. Sur l'image du fondateur des Prêcheurs vinrent sans doute se greffer les aspirations personnelles des donateurs. Aucune messe n'est plus célébrée dans l'église détruite des Prêcheurs de Trèves mais l'Ordre continue de célébrer des messes pour ses bienfaiteurs. La présence des dorsaux à Toulouse n'est connue que de quelques conservateurs et historiens trévirois mais tout visiteur de la Maison Seilhan entend parler de Johannes Wimarus Piper, de Johannes Fridericus Gihr, de Christophorus Wittman et d'Adamus Binque. Les attentes des mécènes semblent comblées au-delà de ce qu'ils pouvaient concevoir...

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